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Le choix des choix

6/10/2024

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Le Maçon est par définition un ouvrier de l’émancipation - de soi et de la société. Mais avec quels outils realiser notre liberté ? Des voies, il y en a beaucoup. Ce petit essai esquisse la recherche personnelle d'un tel outil d’émancipation par la reflexion. Un parmi d'autres.

​Une Loge ou l'esprit maçonnique fleurit, éduque une maitrise tout à fait inhabituelle. La Maitrise et son perfectionnement de sagesse, nous doivent ouvrir des horizons toujours plus hauts et plus riches en possibilités. Je cherche ici, l'outil pratique de pensée pour accroitre cette richesse en naviguant les vents contraires d'un monde "moderne" mécanisé par les causalités apparemment inexorables des faits, des nombres et des technologies.

Au lieu de promouvoir une pensée unique "maçonnique" notre Fraternité cherche à réunir une pluralité de libertés de d’esprit, des choix personnels riches, opposés aux dogmes et aux dictatures. L'art du choix nourrit une de ces libertés. La vocation du symbole "Liberté" est justement de ne pas réduire cette multiplicité de choix, mais de l'encourager en harmonie.
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Le choix des choix


Comme il semble, il n’y a pas de liberté absolue, sauf dans les rêves et les théories. Il apparait que nos vouloirs ne peuvent que se mettre en accord avec ce qui est donné, ce qui est nécessaire, plus haut, autour, au-delà, plus profond que ce que nous voulons. La Pañchatantra écrit si bien :

« Ah ! ce qui ne doit pas être ne se produit  pas,
Et ce qui doit être arrive sans effort.
Même à portée de main, vous échappe
Ce qui ne doit pas exister. » (1)
 
Pourtant, nous gardons l’optimisme, notre vécu n'est pas réduit à la fatalité des causes et des effets ; comme dit Spinoza ironique, même une pierre jetée se croirait – si consciente – voler librement [2]. Tels cette pierre, les gens rêvent d’un libre arbitre qui dit « Je le veux, car j’ai mes raisons ou parce que c’est mon bon plaisir ! ».

En fait, notre liberté mesurable est minuscule, limitée par les besoins de nos corps, la fragilité de nos santés, la brièveté inexorable de la vie; les inévitables obligations et devoirs, l’argent, les lois, les frontières, les us et coutumes nous tiennent bien en laisse.

Même nos raisons et notre volonté – surtout quand elles se sentent libres (car qu’on les laisse battre la campagne) – ont plein de causes et biais qui nous échappent, cachées dans les angles morts de notre nature trop humaine et de notre mental faillible. Pire, elles sont limitées en plus à ce que nous pouvons concevoir. Il paraît qu’on veut ce qu’on est capable de vouloir... L’horizon de nos libertés compare nos désirs et nos valeurs avec nos devoirs et nos moyens.
Ceci est bien entendu une réflexion dans l’absolu. Heureusement, nous ne vivons pas dans l’absolu. C’est l’homme qui est la mesure de toute chose humaine. À chaque moment de la vie. La liberté vécue de l’individu humain n’est pas un objet mesurable de l’Univers matériel, elle n’est pas une question de physique ou de mathématiques mais de pensée, d’action, de morale et de biographie ; les frontières de notre propre vouloir sont, bien par-delà des contraintes matérielles, les limites de notre conscience, d’imagination et de notre capacité à penser dans le temps long.
​
En notre for intérieur et dans la vie de chaque jour, ce mot, liberté, a son sens authentique bien au-delà du plaisir et de l’avoir, qui nous asservissent plutôt que de nous libérer ; l’idéal de liberté porte aussi loin que ce que nous concevons avoir l’intention, faire et vivre. Les autres grands discours nous miroitent de belles philosophies ou de la démagogie creuse.
Au monde profane, notre image de la liberté est à son tour, et encore plus, de dimension sociale et pratique ; nous ne rêvons pas nous libérer de toute causalité mais plutôt de la peur, des tyrans, des empêcheurs, et aussi de l’akrasie, l’impuissance dans la conduite de notre vie ; notre liberté y est présente, par la faculté de trouver et de créer des choix dans la sphère d’espace et de temps qui est notre histoire de vie. Modeste comme elle est, cette sphère est néanmoins l'espace et le temps ou passe notre vie entière.
*
Dans le trop grand débat de la Liberté en général, je dévoile ici un petit ilot d’ingéniosité, pour ceux qui agissent afin d’agrandir la somme de leur liberté individuelle par la multiplication de leurs choix.
*
Je propose qu’individuellement, nous n’avons pas excuse d’être fatalistes ; la personne habile, qui apprend, qui comprend, et qui prend initiative avec un brin de courage, trouve et se crée beaucoup de liberté, par ses choix.
Qu’il est triste pourtant que tant de liberté potentielle reste inaccessible à autant de gens, simplement parce qu’ils ne savent même pas ce qu’ils peuvent vouloir !
*

Qu’est-ce que la liberté humaine, en fait ?
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La liberté pratique tâche – en sens positif – d’être son propre maître : faire ce qu’on préfère, devenir qui on veut être, avoir, réaliser ce qu’on désire.

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Un bémol: étrange paradoxe, maîtriser mon vouloir spontané, vouloir juste, respecter ma propre mesure, avoir le courage de risquer et de perdre, me donne beaucoup plus de liberté que réaliser tout ce qui me passe par la tête.


​
Maîtriser ce que je veux et vouloir ce qui dépend de moi est une liberté plus haute, qui m’appartient vraiment.

En sens négatif – tout aussi important – la liberté est de ne pas être contraint ou souffrir, de ne pas devenir, de ne pas être ce qu’on ne veut pas, de ne pas faire ni laisser faire l’inacceptable. [3]. De pouvoir dire non ! De ne pas être captifs ou entraînés là où nous ne voulons pas aller.

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Nuance: En fait, apprendre à éviter ce que je ne veux pas, y échapper, a pourvu dans ma vie plus de liberté que de vaincre par la force ou par mon droit. 
Comment être libre face à un monde où « tout est nécessaire » ?

​Telle liberté de fait est réalisable, malgré l’omniprésence des contraintes et causalités données, à cause de la complexité et du désordre de la multitude. Dieu merci, il y a le Chaos !
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  Notre monde humain, tel qu’il nous est donné, foisonne d’entropie, de variantes, de possibilités et de carrefours. Les limites infranchissables de ce monde sont toujours à comprendre dans un monde encore et encore plus vaste pour qui le comprend.

​L’étroitesse de tout ordre contraignant est diluée dans le temps et dans l’espace comme la chaleur qui s’y disperse inexorablement. Ce qui est imposé et contraint souffre d’une érosion permanente par le temps, l’imprévu, l’erreur et l’incompétence de ceux qui l’imposent. Panta Rhei. Les choix qui émergent ainsi, sont plutôt incalculables. L’aptitude d’en tirer parti est la source d’une liberté de raisons et d’intentions que nous pouvons former, nous si petits, malgré le règne inexorable des lois et des contraintes. 

ImageThe boat is small but it still navigates
Dans le cours des causalités qui nous sont présentées comme nécessaires – car c’est ainsi que notre monde social est décrit de nos jours, en le réduisant faussement à un univers mécanique et technologique – il y a toujours quelque niche, quelque incertitude, occasion, quelque sentier peu battu qui nous permet d’être ce qu’on appelle un « agissant » agent, comme dit Hannah Arendt, c’est à dire un qui agit par lui-même – une personne autonome, capable de commencer quelque chose de nouveau et d’inattendu, voir imprévisible. L’océan est le même pour tous, mais un tel « agent », auteur d’actes, navigue sciemment dans une direction voulue. (La bonne chance aide aussi.) L’initiative qui surprend ou qui, mieux encore, passe inaperçue, qui change quelque chose, le « non faire » taoïste qui laisse s’éparpiller, couler ailleurs quelque chose d’indésiré parce qu’on ne fait rien pour l’arrêter, est possible, même depuis la position du plus faible. Le Tao-te-Ching a révélé ceci depuis bien longtemps. En vérité, les petits, parce qu’anonymes, ont souvent plus de choix que les grands de ce monde qui sont trop en vue.

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Les scientifiques s’obstinent à regarder l’Univers comme entièrement interconnecté, déterminé et prévisible – en principe – descriptible par les formules nécessaires d’une vérité cohérente. Même le fortuit, l’accident et le chaos suivraient des lois statistiques. Soit ! Heureusement, dans le monde humain, quelques données manquent toujours dans les calculs généraux ou même particuliers, jamais complets ; les régularités apparemment contrôlables sont pourtant si nombreuses, le désordre et l’imperfection de leur enchevêtrement inévitables, l’erreur humaine si présente, les interstices si évidents, qu’il reste toujours espoir de glisser à travers les contraintes, choisir et obtenir ce qu’on poursuit.
Au comble des sociétés les plus surveillées, où tout ce qui n’est pas interdit est obligatoire, la complexité reste telle qu’il est impossible de tout contrôler. La complication et les myriades de vecteurs de champs de force sont si immenses, les scenarii potentiels si éparpillés, qu’il reste toujours possible pour vous et moi de faire, chaque jour, des choix qui comptent. Ceci, ces choix – si nous apprenons à les discerner et saisir– peuvent être nos actes de « libre arbitre ». 

Pourvu que nous développions une attitude et une maîtrise particulière. Nous accorder à la complexité du monde, tolérer l’incertitude et la pluralité, naviguer par les interstices de ce qui entrave, requiert une main légère, pas une tête de bélier. Il nous faut la flexibilité et la résilience, un art leste d’aller comme avec le courant, mine de rien… ou, parfois, le cran de trancher dans le vif. Certes, les dons innés pour faire ceci sont plutôt rares ; pourtant, apprendre ces attitudes et stratagèmes extrem-orientales est accessible à tous, du plus humble au plus doué, la condition étant l’ouverture d’esprit et la modestie d’être apprenti.
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Laissez-moi illustrer cet art de la glisse par une antique anecdote taoïste de Tchouang-Tseu, un de mes penseurs favoris :
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« Le cuisinier Ding dépeçait un bœuf pour le prince Wenhui. On entendait des hua ! quand il empoignait de la main l’animal, qu’il retenait sa masse de l’épaule et que, les jambes arc-boutées, du genou l’immobilisait un instant. On entendait des huo ! quand son couteau frappait en cadence comme s’il eût accompagné l’antique danse du Bosquet ou le vieux rythme de la Tête de lynx.

- C’est admirable ! s’exclama le prince, je n’aurais jamais imaginé pareille technique !

Le cuisinier posa son couteau et répondit :

… Quand j’ai commencé à pratiquer mon métier, je voyais tout le bœuf devant moi. Trois ans plus tard, je n’en voyais plus que des parties. Aujourd’hui je le trouve par l’esprit sans plus le voir de mes yeux. Mes sens n’interviennent plus, mon esprit agit comme il l’entend et suit de lui-même les linéaments du bœuf. Lorsque ma lame tranche et disjoint, elle suit les failles et les fentes qui s’offrent à elle. Elle ne touche ni aux veines, ni aux tendons, ni à l’enveloppe des os, ni bien sûr à l’os même. Les bons cuisiniers doivent changer de couteau chaque année parce qu’ils taillent dans la chair. Le commun des cuisiniers en change tous les mois parce qu’ils charcutent au hasard. Mais avec ce couteau, qui lui sert depuis dix-neuf ans, votre serviteur a dépecé plusieurs milliers de bœufs et pourtant la lame est encore tranchante comme au premier jour. Car il y a des interstices entre les parties de l’animal ; le fil de la lame, qui n’a pas d’épaisseur, y trouve tout l’espace qu’il lui faut pour évoluer. C’est ainsi qu’après dix-neuf ans, elle est encore comme fraîchement aiguisée... » [4]

Retenez ce paradigme qui coupe dans le vif du sujet. Il sert bien celui qui le comprend.

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Je le redis : Pour une personne en chair et os, comme vous et moi, le mot « liberté » clamé en général, ne vaut pas grande chose ; il n’a de sens que concret, par la nature et la richesse des choix que nous pouvons concevoir et – ultérieurement – faire. Le « combien de liberté » est toujours celui d’un domaine précisé de notre vie et dans un but défini. Combien de portes nous sont connues ? Combien ouvrables?

Nos libertés peuvent être jaugées à chaque instant – pour chaque dessein et chaque but envisagé – par la variété et latitude des choix importants que nous sommes capables de concevoir, osons faire et pouvons faire sans subir dommage grave.
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Mesurer combien nous sommes libres à un moment donné inclut d’examiner – pour chaque domaine qui compte pour nous : mouvement, pensée, expression, vie spirituelle, famille, travail, action politique, vie sociale, loisir… – ce qui facilite ou appauvrit nos choix : Quelle « liberté d’entreprendre » doit-on avoir ou prendre, de quoi faut-il se libérer, pour faire, obtenir ou devenir, ce dont nous avions l’intention dans ce domaine-là ? [5]

Le point de départ pour accroître notre liberté est en nous.

Même dans la tête, il y a de nombreuses libertés plutôt qu’une seule, mais il faut les trouver. Ou les créer. C’est la faculté et le courage de savoir. Sapere aude ! Le premier grand pas vers la liberté est l’émancipation du choix intérieur par la multiplication de nos critères de référence. Ne comptez pas sur l’École pour nous les donner. C’est chez les vrais maîtres et dans les grands livres qu’on la trouve. Heureux ceux qui les héritent en famille. 
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La plus grande de nos armées dans la conquête des libertés sont les livres:

ImageUne citadelle de livres
Pour naviguer à travers les labyrinthes de choses "qu’il faut" et de choses impossibles ou interdites, nous avons avant tout besoin d’une destination idéale en guise de carte et compas – et d’une citadelle mentale de liberté comprise, comme celle de Goethe, d’une vision du monde émancipatrice placée dans le futur. Une Weltanschauung libératrice, car spacieuse et riche. Ce royaume intérieur de liberté est fait de culture, se nourrit de l’ouverture d’esprit et dessèche, par son contraire, la fermeture d’esprit.

L’étroitesse, la fermeture, les raisons satisfaites d’elles-mêmes, - même puissantes, vraies et précises - sont pauvres d’esprit. Elles ne sont jamais libres.

​Les doctrinaires rigides ont des pieds d’argile.

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Nous devenons émancipés dans notre esprit par disponibilité et par abondance du vécu et de l’appris : de repères, de nuances, de connaissances, de familiarité, de culture, de pensées et de notions, de tournures d’esprit, de sentiments et d’émotions. Par la richesse aussi de l’expérience pieds sur terre, l’apprentissage d’avoir voulu, réussi et failli beaucoup de choses.
 
L’autre grande source de liberté intérieure est de réaliser que tant de choses étant données, nous pouvons pourtant en créer d’autres, nous-mêmes ; par la capacité d’inventer, d’imaginer ce qui n’est pas encore, par notre initiative, en donnant forme à ce qui n’en avait pas. C’est en ce sens, je crois, que George Bernard Shaw faisait dire à son Serpent au Paradis : « Les gens voient des choses et disent « Pourquoi ? ». Moi, je rêve de choses qui ne sont pas et demande « Pourquoi pas ? »[6]
 
Plus je sais et ressens sur plein de choses très diverses – et sur moi-même – plus j’ai de quoi et avec quoi choisir, à quoi comparer pour juger. Ce trésor me rend ingénieux et inépuisable, préparé aux alternatives à la rencontre des obstacles.
Allons encore plus loin que la liberté intérieure par la richesse d’imagination !


C’est le gouvernement de soi-même qui donne corps à notre liberté.

Le début consiste toujours à dénicher pourquoi je veux une chose que je veux. « Qu’est-ce qui me fait vouloir telle ou telle chose plutôt qu’une autre ? Quelle est la cause et quel but servira-t-elle ? Y a-t-il d’autres choses équivalentes à vouloir qui rempliraient la même fonction ?» Ceci me permet de soupeser l’éventail des options.
  • Devenir ainsi arbitre de mes désirs est un grand pas vers la liberté. Je suis libéré dans ma tête quand je me comprends et je suis conscient pourquoi je « veux », pour mieux juger si mon désir vaut la peine, s’il n’est pas simple lubie, imitation, faiblesse ou vice, soumission aveugle à mes instincts et pulsions, ni simple ignorance des choix qui comptent.
Il y a en fait une multitude de choses à vouloir, à chaque instant, en chaque situation et qui donnent des résultats semblables. Un grand choix.
  • Souvent, à la réflexion, ce que je veux ne vaut pas le prix à payer. Une grande partie des choses que nous voulons nous asservissent ; par le coût de les obtenir ou garder et par la peur de les perdre. Moult positions, charges, titres, relations, fascinent ma vanité ou m’occupent et me sauvent d’ennui. En échange, elles m’obligent et m’asservissent et mangent mon temps, dilapident ma vie. Devenu conscient de ces ficelles qui me transforment en pantin, je peux – si nécessaire – m’en libérer.
  • Je peux élargir mes choix d’une autre manière encore. Chaque résultat voulu, chaque chose qui vaut pour moi, que j’ai bien réfléchie vouloir, peut être réalisée de diverses manières, avec des moyens, des gens en des lieux et temps différents. Je peux traduire et sublimer. Encore des degrés de liberté. Une attitude mentale réfléchie, flexible et ouverte, dont les choix évoluent pour épouser les alentours qui changent sans cesse, accroit d’autant plus ma liberté. La rigidité et l’obstination font le contraire.
 
 
Le travail sur soi une fois fait, la liberté intérieure trouve son chemin vers l’extérieur.
​

Une fois clarifié ce que je veux et ce qui vaut la peine, conscient des choix praticables à travers ce qui entrave telle voie, instruit de ce dont j’ai besoin pour y parvenir, le travail pour pratiquer ma liberté devient tangible. Je vois aussi qui ou quoi limite ma liberté voulue ; est-ce moi-même, le manque de ressources et d’autorité, les circonstances ou d’autres gens? Je peux œuvrer pour cette liberté-là, un plan devient palpable. Je deviens fondé dans mon sens critique pour revendiquer ce qui est de droit, pour chercher le moyen, le pouvoir nécessaire ou l’opportunité de le prendre. Les occasions à saisir prennent contour. Je suis prêt.

Arrive le kairos, l’occasion ou l’idée voit son temps venu.
​

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Kairos, le dieu du moment venu...
*

De même que la liberté intérieure est richesse dans l’esprit, notre liberté manifeste, extérieure, peut être jugée, pour chaque domaine important, par la gamme et la portée de choix notables que nous pouvons décider et mettre en application [7] – sans être gravement lésés – concernant nos actes, ce que nous ne faisons pas, ce que nous rejetons…           
 
Notre domaine de liberté le plus voyant est la liberté de communiquer.
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L’homme moderne agit par l’acte bien entendu, mais le plus souvent son acte est la parole. Nous faisons des choses avec des mots plus souvent qu’avec des outils ou avec des armes.
​
Dans le monde, nous sommes libres tout d’abord par la diversité de ce que nous pouvons exprimer et communiquer avec sincérité – ou au moins avec habilité, pour agir à plusieurs. Pourtant, afin d’amplifier cette communication, nous avons besoin en préalable de plus qu’une « liberté d’expression » autorisée. Nous avons besoin de connaître et de maîtriser beaucoup de mots et de manières de communiquer. Avec cette maîtrise seulement, notre liberté d’être quelqu’un, d’exprimer et donner portée à ce que nous pensons, de faire des choses avec des mots, va trouver sa voie, même dans des situations et des mondes qui ne sont pas libres.C’est pour cela que la culture générale classique ; la littérature, l’Histoire, les langues, les arts, la rhétorique, jadis réservées à l’éducation d’élites, constituent toujours  l’éducation des gens libres. Leur réduction prétendument démocratique en faveur de « mots et savoirs simplifiés, utiles et accessibles à tous » est la voie perverse vers la servitude des nouvelles générations. Avec peu de mots mal maîtrisés, timides et confus, noyé dans les clichés, entravé par l’hypocrisie publique, l’homme est relégué parmi les opprimés même dans un pays « libre ».

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En essence, la liberté prend corps dans le choix effectif d’agir, de faire ou ne pas faire.

  • Dans la vie qu’on vit, on est libre quand on pratique constamment un vrai choix des choses qui comptent, qu’on peut faire ou ne pas faire, subir ou rejeter, être ou éviter d’être.
  • Nous sommes libres quand, au-delà de savoir qu’il y a des choix et nos rêves de liberté, nous procédons à ces choix et persistons en ce que nous avons choisi de manière qu’il devienne vrai pour nous de dire : « Ce qui m’arrive est de mon propre fait. »
  • Telle liberté s’accroît – au-delà des ressources matérielles – avec l’énergie, le courage, le savoir-faire, l’effort et la résilience, en devenant capables de se dépasser et de naviguer de longs périples à travers difficultés, contraintes et obstacles. La liberté n’est pas pour les paresseux.
Je juge être libre en mes paroles et faits lorsque je me sais responsable de ce que je dis et fais. Si vous n’êtes pas responsable, vous n’êtes pas libre ; si vous n’êtes pas libre, vous n’êtes pas responsable, plutôt un exécutant ou un complice. 

À la fin, nous sommes libres quand nous regardons en arrière à ce que nous avons accompli – avec succès ou non – et nous sommes satisfaits que nos choix respectent nos valeurs, que nos intentions sont cohérentes, au lieu de découvrir qu’on nous a dupés, piégés à mal vouloir, ou pire, que nous nous sommes trompés de chemin, vaincus par l’erreur, l’obstination et la faiblesse. Come disait Charles le Téméraire « Il n’est pas nécessaire d’espérer pour entreprendre ni de réussir pour persévérer. »
*
Si vous voulez libérer les gens, rendez-les conscients de la multitude des choix ; dans l’ignorance, sans éducation pour faire des choix, ils restent esclaves même dans des pays tout à fait démocratiques. J’aime dire qu’en donnant lumière, il faut la projeter vers l’avant pour éclairer le chemin et ses choix, et surtout pas la jeter dans les yeux pour étonner et aveugler.
​
 
Pourtant…Est-ce que les majorités veulent vraiment être libres ?

Image...D'autres sont tombés sur des endroits pierreux... ou alors, c'est l'effet papillon.
Être libre demande à nos semblables de comprendre et penser aux choses compliquées, avec leur propre tête ; pourtant, la plupart des gens préfèrent qu’on rende les choses simples pour eux.

La liberté rend responsable. Souvent je vois qu’à plusieurs nous fuyons la responsabilité.

La liberté prend le risque de faire autre chose, de surprendre autrui avec l’incertitude, de se faire surprendre avec l’inconnu. La multitude a horreur du risque et réagit mal aux surprises.

Être libre requiert de l’initiative mais le bon peuple anonyme est paresseux.

Qui veut être libre en fait ? D’après Etienne de la Boétie, nous tous, en tant que foule, souffrons d’une fascination de la servitude volontaire [8].

Si vous cherchez une grande liberté, rappelez-vous donc la fable ésopique du chien enchainé mais nourri et du loup qui a préféré au collier le froid et la disette de sa liberté.

Méfiez-vous aussi de faire de la liberté un idéal unique, excessif, errant aux dépens de toute autre chose. L’obsession de la liberté parce qu'on en a été frustré, dépense la vie sans porter de fruits. J’ai fait cette erreur de vie pour en constater trop tard le prix : toujours préoccupé de devenir et rester libre, j’ai longtemps négligé de construire et réaliser le plein de ce que mon héritage m’aurait permis. Quel gâchis !

En somme, pour être libre faites vous-mêmes vos choix !

En ce qui me concerne, je veux toujours être libre, défendre ma liberté et l’accroitre, pour servir à quelque chose de bon. D’autre gens font de même, d’après ce que j’ai observé et lu. Ces pages sont écrites pour nous, les épris de la liberté de construire, prêts à payer un prix. 

Même pour cette minorité, le fait est que pour la plupart nous ne faisons pas suffisamment attention à combien il y a de choix et nous nous embourbons sans y penser dans les alternatives préfabriquées par autrui : autorités, tels des maîtres d’école, maîtres à penser, spécialistes, petits chefs et tyrans de toutes sortes, la médiocrité ambiante et, plus récemment, ordinateurs stupides intitulés « intelligents ». Plus haut, les dogmes désincarnés de religion, de méthode ou d’idéologie, les systèmes de pensée qu’on nous révèle comme indiscutables, ne sont pas des choix mais plutôt des abandons. On nous mène en bateau.

Trop de dés qu’on jette devant nous avec impudence sont pipés de préjugés, d’options incomplètes et même insoutenables comme le « Choix de Sophie » [9]. Ne nous laissons pas acculer !

Pour vivre libre rappelez-vous : très souvent, il y a un choix des choix qu’on ne nous propose pas.

Ne laissez pas vous dire : « Le choix est ceci ! » mais pensez plutôt : « Voici quelques choix proposés, voyons s’il y en a encore d’autres. »
​
Ne confiez pas à autrui de décider quels choix existent, ne laissez pas un autre choisir les choix pour vous.

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Le chat qui s’en va tout seul extrait d’Histoires comme ça de R. Kipling - blog.kp.ru
©2011- 2024 Ioan Tenner
 Source : http://wisdom.tenner.org

​Notes
[1] L’art de se faire des amis, Contes sanscrits extraits du Pañchatantra, traduits du sanscrit par Alain Porte, Ed Philippe Picquier, Mas de Vert 1999
[2] Spinoza, LETTRE XXIX. (O.P. : LXII ; C.A. : LVIII) p.59-60, in ​SPINOZA LETTRES, TRADUIT PAR E. SAISSET (Ed. 1842), http://www.spinozaetnous.org :
"Une pierre soumise à l’impulsion d’une cause extérieure en reçoit une certaine quantité de mouvement, en vertu de laquelle elle continue de se mouvoir … Concevez maintenant, je vous prie, que cette pierre, tandis qu’elle continue de se mouvoir, soit capable de penser, et de savoir qu’elle s’efforce, autant qu’elle peut, de continuer de se mouvoir. Il est clair qu’ayant ainsi conscience de son effort, et n’étant nullement indifférente au mouvement, elle se croira parfaitement libre et sera convaincue qu’il n’y a pas d’autre cause que sa volonté propre qui la fasse persévérer dans le mouvement. Voilà cette liberté humaine dont tous les hommes sont si fiers. Au fond, elle consiste en ce qu’ils connaissent leur appétit par la conscience, et ne connaissent pas les causes extérieures qui les déterminent. C’est ainsi que l’enfant s’imagine qu’il désire librement le lait qui le nourrit ; s’il s’irrite, il se croit libre de chercher la vengeance ; s’il a peur, libre de s’enfuir. C’est encore ainsi que l’homme ivre est persuadé qu’il prononce en pleine liberté d’esprit ces mêmes paroles qu’il voudrait bien retirer ensuite quand il est redevenu lui-même ; que l’homme en délire, le bavard, l’enfant et autres personnes de cette sorte sont convaincus qu’ils parlent d’après une libre décision de leur esprit, et non par un aveugle emportement." pp 59-60
 [3] Pour comprendre les notions de liberté négative et positive lire Berlin, I. (1958) “Two Concepts of Liberty.” In: Isaiah Berlin, Four Essays on Liberty, Oxford University Press, Oxford, 1969. À noter que Berlin – le philosophe qui a proposé les notions originales de liberté positive et négative – les définit différemment ; pour lui, la liberté positive est la « liberté de.. », d’être son propre maître, l’instrument de soi-même, celui qui agit, ou au moins participe à la gouvernance de sa vie ; liberté négative est pour Berlin d’être « libre de » d’obstacles, coercition, d’autrui, pour pouvoir agir.
 [4]Yangshengzhu, 3/b trad. Jean-François Billeter notes de cours Univ. de Genève, I.T. Eté 1998. Voir aussi: Jean François Billeter, Leçons sur Tchuang-tseu, Ed. Allia, Paris, 2004, p. 15-16.
[5] La description « en triade » de la liberté en tant que chose précise et intelligible, est proposée par MacCallum, Jr., Gerald, C., Negative and Positive Freedom, The Philosophical Review,  Volume 76, Issue 3 (Jul.,  1967), 312-33 : « … la liberté est ainsi, toujours de quelqu'un (un agent ou des agents), de quelque chose, de faire, de ne pas faire, de devenir ou de ne pas devenir quelque chose ; c’est une relation en triade. Prenant le format « x est (n’est pas) libre de y, pour faire (ne pas faire, devenir, ne pas devenir) z ». x représente des agents, y se réfère aux conditions qui empêchent – contraintes, restrictions, interférences, et barrières. z couvre le domaine des actions, conditions, caractères ou circonstances. »
[6] Shaw, G.B., Back to Methuselah., Constable, London, 1949, act I
[7] Cette mesure des choix et leur qualité d’être notables, concerne la liberté vécue de la personne, riche ou maigre à un moment et dans un contexte donné. Je préfère cette évaluation au lieu de l’explication passive et soumise de « la nécessité comprise » ou de l’illusion de « libre arbitre » et encore moins d’un rêve fou en déni de toute causalité, qui se donne licence de faire n’importe quoi. Certainement, la liberté vécue par l’homme n’a pas à se conformer aux définitions des philosophes, ni des idéologues ; le bon sens et le bien être doivent définir ce qui est notre liberté.
[8] Etienne de la Boétie, Discours de la Servitude Volontaire, 1574
[9] IMDB « Le choix de Sophie » (Sophie's Choice) (1982) Alan J. Pakula, d’après le roman de William Styron 1979
 
Image, dans l’ordre :
Les gyres du cerveau penseur, un labyrinthe de choix... cc 4.0 Wellcome Images
Superman (CC BY-NC-ND 2.0) Keith Riley-Whittingham 2009 flickr
Mon petit Bouddha
Laocoön_and_His_Sons (CC BY-SA 3.0) Un JuanMa 2005
Florescences
Small Boat, big ocean source plus.google.com
Clockwork_Universe_by_NitroX72 vikia com
Le Boucher de Zhuangzi tongyeouki.com 2013
Opening-doors source workbloom com
Érik Desmazières - Illustrations for Borges' story of the infinite library 2019
Choosing of the Arrow Henry Kirke Brown 2005 Metropolitan Museum of Art
Free-speech-Foundation of individual Rights in Education
Freedom from. Zenos-Frudakis-3
Untitled (CC BY-SA 3.0) Michael Jastremski openphotonet_2014
Le chat qui s’en va tout seul extrait d’Histoires comme ça de Rudyard Kipling blog.kp.ru

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