Quel maçon ne songe pourtant, parfois, au moins vaguement - à ces questions : Ce haut concert qui réunit les bonnes volontés, qui rend la vie plus vivable en toute société quelle qu’elle soit, existe-t-il en chair et en os sur ce Globe si divisé ? Les frères d’ailleurs, d’autres langues, d’autres ethnies, croyances et cultures, sont-ils comme nous, avec nous ? Accueillent-ils le frère esseulé en voyage ou le laissent-ils étranger parmi des étrangers ? De plus, à quoi sert la Franc-maçonnerie de nos jours avec tant de cheveux gris? Comment va-t-elle ? Les différences de rites, les règles aussi pointilleuses que locales, ces ruptures historiques de traditions ont-elles eu raison de notre idéal et de notre vitalité? Nous ont-elles réduits au charme discret de réservations exotiques opposées à des clubs populaires d’opinion politique? Ou alors sommes-nous, malgré tout, comme je crois, des Menschen; frères et sœurs d’une spacieuse alliance spirituelle? Porteurs d’une idée qui réunit ce qui est épars, définition sans laquelle, justement, nous resterions pour toujours dispersés?
Notre T:.C:.F:. Tristan est parti de Mons, voir et se convaincre par lui-même. Avec son fil à plomb est son drone. Heureusement, il a pris avec lui le professionnalisme du cinéaste, son enthousiasme, une bonne équipe (un bon budget) et un itinéraire de laborieuse préparation. Car, gagner la confiance de tant de loges qui se méfient des média et des caméras est en soi un exploit.
Le résultat est une œuvre qui constitue aussi un document de référence pour tout maçon ; négliger de voir les deux heures de Terra Masonica c’est vraiment manquer un témoignage historique et un voyage formatif irremplaçable. Je crois ferme que ce film, largement diffusé, ne va pas finir en tombant dans l’oubli comme supposait humblement le réalisateur pendant la discussion avec les spectateurs de la première publique genevoise.
Pour le grand public – une grande diffusion étant en cours, en salles, télévisions, DVD et Internet -Terra Masonica offre une fenêtre ouverte en toute transparence aux curieux et aux intéressés; mais les avides de théories de la conspiration et les machines à phantasmes vont, comme il me semble, éviter de le voir ou d’en parler.
La présentation et la discussion avec le public – elle-même très informative - étaient organisées par le GROUPE DE RECHERCHE ALPINA. Ce qui manquait dans la salle pleine était, curieusement, la Presse genevoise, il semble que seuls les Cahiers Bleus étaient représentés. Pourtant, c’était une riche occasion d'apprendre, de poser des questions et d’avoir des réponses en toute franchise au lieu de fantasmer. Enfin, on a tous suivi avec un intérêt soutenu les deux heures de projection, chaleureusement applaudie. Après la projection, les questions de la salle ont été l’occasion de réponses du réalisateur et des commentaires de l’hôte, le Président de G.R.A., Dominique Alain Freymond ; cette partie fut une conférence de presse exemplaire.
J’ai regardé Terra Masonica deux autres fois ; la deuxième, de mon DVD pour récapituler le contenu. La troisième fois, après lecture de plusieurs recensions du Dossier de presse, j’ai pris le temps, malgré la chaleur de cet été, de refaire le voyage séquence par séquence, comme un écolier, arme de mon point de vue, pour étudier en lecture lente «ce qui est dedans» pour écouter attentivement ce qui est dit, prendre des notes et aussi pour apprécier ce qui n’est pas là, ce qui me semble manquer.
Le fruit de ces notes de lecture est, dans mon intention, une critique bienveillante. (Ailleurs, j’explique trois genres de critique: la bienveillante qui sert pour aider de bonne foi, l’indifférente qui se veut objective et juste, aussi la critique hostile faite pour punir et nuire.) Ainsi, critiquer avec bienveillance sollicite l’avenir au lieu de délibérer du passé. Je pars de la conviction que le réalisateur va faire suivre ce documentaire qui s’inscrit d’ans une série («La Clé Écossaise» (2008), «Le procès d’Arthur Neupré» (2015)) avec d’autres grands documents, pour couvrir l’ensemble de la Franc-maçonnerie mondiale.
Le périple partie I
A l’occasion d’une installation de Vénérable, seule la cérémonie extérieure peut être filmée. Les maçons comprendront naturellement pourquoi cette cérémonie ne doit être un spectacle, afin de garder le respect et l’authenticité du rituel sacré. Par contre, les spectateurs « profanes » de Terra Masonica resteront comme d’habitude avec l’impression qu’il y a des choses secrètes qu’on ne peut pas montrer. Voici dès le début le problème récurrent de l’image publique de notre ordre. Au moins, ici, le spectateur apprend que les Vénérables sont démocratiquement élus, pour deux ans, comme il sied dans une société du XXIe siècle : «Derrière les portes de la Loge Mère on est tous égaux» nous explique le Vénérable.
Il est impressionnant de voir à Kilwinning comment le Franc-maçons sont au cœur de la ville, de la communauté de citoyens qui les connaissent bien, fiers d’avoir parmi eux ces gardiens – de père en fils - des traditions et de l’identité. Pour un moment, ici, l’histoire de l’Écosse semble arrêtée. Nous apprenons que la vocation des maçons est de soutenir la communauté, de promouvoir le respect et le service de l’humanité. Comme l’a si bien exprimé Robert Burns, le poète.
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L’histoire de l’Indépendance se voit sur les murs, tous les drapeaux sont là ; car la Maçonnerie, qu’elle soit d’origine jalousement Britannique, est partout patriote, c’est un de ses principes profonds, au contraire des accusations malveillantes de cosmopolitisme apatride et de conspiration universelle. Nous voyons aussi que les maçons de nos jours sont des gens comme tout le monde, restaurateurs, tatoueurs, les princes s’y font rares, surtout aux USA. On nous explique qu’en loge on s’améliore qui qu’on soit, on apprend la modestie, le respect et le regard pour le côté humain si souvent oublié dans le tumulte du monde extérieur.
En aparté, en écoutant ce discours que je respecte sans réserve, je pense, du point de vue de la FM libérale, au fait que cette fière obligation de croire juste reste tristement un clivage artificiel dans notre grande communauté universelle. Mais, il ne me semble moins vrai que prescrire aux gens ce qu’il faut ne pas croire est tout aussi dogmatique et diviseur. Ce fait observable que la spiritualité humaine est irréductiblement plurielle, est-il vraiment intolérable pour l’esprit illuminé ? Que toute spiritualité, pas seulement religieuse, mais aussi agnostique, même athée, qui promeut le bon, le vrai la concorde et le beau, les valeurs humaines les plus hautes est dans l’esprit de la Franc-maçonnerie ?
En 1980 cette Grande Loge comptait 239.000 membres, quelque trente ans plus tard, à peine 100.000. On nous explique un changement de société : de l’aide au prochain on est passé en deux générations à l’égocentrisme, « L’individualisme est roi ». Cette décroissance se fait sentir dans tous les pays occidentaux. Le somptueux patrimoine architectural devient difficile à préserver. A New York on voit des temples à vendre, transformés en clubs et discothèques.
« LA G.R.A. publie en septembre 2018 le IIe tome du Guide Suisse du FM, un inventaire extrêmement précis de la Maçonnerie en Suisse. La Franc-maçonnerie suisse avait 5000 membres en 1935 et on a aujourd'hui de nouveau 5000 membres. Avec l'initiative Fonjalaz et la IIe Guerre mondiale, les effectifs étaient tombés à 2500 membres à la fin de la guerre et sont remontés après…à 5000. Actuellement, de ces 5000 membres 3500 font partie d'Alpina, 1500 d'autres Ob:., des loges d'hommes et des loges mixtes, il y a mémé des loges indépendantes. Chaque loge a son cycle, certaines n'ont pas réussi à faire le cycle des générations et donner les clés aux jeunes, d'autres ont réussi cette intégration, l'ouverture aux autres et se développent très bien... La FM Suisse continue à se développer. L'important n'est pas le nombre mais la qualité des membres. »
Nous apprenons que la Maçonnerie américaine a connu son plus grand nombre d’adhérents entre la fin de la deuxième Guerre Mondiale et les années 1980. Les maçons du 3e âge sont maintenant à la retraite. Nous visitons le Village Maçonnique d’Elisabethtown fondé par la GLP en 1910 avec 85 résidents. A ce jour il y a 1900, des gens dont on savait qu’ils ne peuvent pas payer. Voici une œuvre enviable de la maçonnerie des USA. Quatre autres grands villages de ce type ont été construits en Pennsylvanie. Donc, La FM prend soin de ses vieux. C’est la fraternité !
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En passant nous rencontrons l’ordre des Shriners, 400.000 maçons. On les voit à New York dans une collecte de fonds en faveur des nombreux hôpitaux qu’ils soutiennent. Les Shriners ont choisi de travailler dans le monde en sortant des temples.
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Suit une séquence de réalité qui interpelle. Mais où sont les frères afro-américains ? On les sait nombreux, on les a rencontrés au Prince Hall à Atlanta. Prince Hall existe depuis 200 ans, maçonnerie inhérente à la communauté afro-américaine. Un des FF rappelle les principes de Prince Hall : « Je crois qu’en tant que maçons on a une responsabilité - être un homme bon et honnête. Guider sa communauté, guider sa famille. Montrer la voie aux enfants… soulager la veuve et l’orphelin... » Parmi les buts de cette maçonnerie, l’identité et l’émancipation jouent un rôle central. Initialement reconnue par ses homologues, Prince Hall fut bientôt ignorée par toutes les autres maçonneries. Après l’abolition de l’esclavage, les États du Sud ont imposé la ségrégation raciale. C’est seulement en 1990 que la Grande Loge de Washington les reconnaît.
L’histoire est ce qu’elle est. Mais à ce jour les Grandes Loges des neuf États du Sud continuent la séparation de Prince Hall. Avec l’œil Européen on va comprendre ce qu’on pense de cette situation.
Direction État de Paraná au sud du Brésil, pays qui compte 10% de la maçonnerie mondiale, 450.000 membres. Ici, le nombre des maçons c’est multiplié 20 fois depuis 1945 malgré l’apposition des églises catholiques et évangéliques. Plusieurs Grandes Loges coexistent dans ce pays, dont certaines refusent d’imposer la croyance en un principe créateur.
Les sites surprenants s’enchaînent, avec l’excentrique Temple de la Montagne. Un labyrinthe de surprises dont l’autel est illuminé par le soleil une fois par année, au temps du solstice d’été.
La Maçonnerie est arrivée en Amérique du sud par Buenos Aires avec le grand maçon libérateur Jose de San Martin.
La Loge Hijos del Trabajo No 74, fondée en 1882 nous découvre son passage secret pour cas de danger. Une autre, Union del Pilar no 127 travaille dans un centre commercial, parking et sécurité assurés.
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«La maçonnerie c’est pour moi d’accomplir ce que mes ancêtres m’ont légué» explique un Frère «mais surtout, de croître en tant que personne.».
Ici on bâtit sa loge de ses propres mains. Les frères conçoivent la loge comme «une représentation du monde, du corps humain et de l’humanité. Ceci ne signifie pas qu’il n’y a pas de sentiment religieux, c’est un sentiment de tradition, de comprendre cette architecture universelle, un sentiment d’apprendre, d’harmonie et de principes universels.»
De l’extrême sud d’Ushuaia Masonica s’envole dans le long parcours vers l’Arctique en l’extrême Nord de l’Europe.
Le discours des FF est chargé de symbolisme en accord avec ce paysage glacé, qui mêle la nuit avec la lumière aveuglante de la neige.
Le climat et l’isolation créent comme il apparaît, un rapport particulier à la vie. Les FF d’Ultima Thulé vivent « une maçonnerie introspective, méditative et mystique ». Il est très touchant d’écouter l’aveu d’émotion dramatique ressenti par un des frères, à l’occasion de son initiation. Pourquoi l’expérience a été si difficile pour lui ? Il semble parler d’une profonde conversion, les vertus, les mots sont devenus pour lui réalité vécue dans la loge. Un chemin c’est ouvert…
Le rituel est spécifiquement Scandinave, le rite Suédois, d’origine Allemande, d’influence chrétienne et templière. Par conséquent, seuls les chrétiens sont admis. « Comment concilier la tradition avec un monde globalisé ? » demande le commentateur. Je le suis, mentalement, en me demandant comment s’accorde cette limitation avec notre universalité humaniste ? L’hôte confirme que ce sujet les préoccupe et qu’on le discute à tout niveau de l’Ordre. «La Grande Loge de Norvège veut s’ouvrir au monde mais n’a pas encore trouvé la voie. Allier tradition et modernité est une tâche très difficile.»
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Faisons une parenthèse. Il apparaît qu’en France, l’accès aux loges pourtant si nombreuses, parmi tant de Grandes Loges et rites, traditionnellement réguliers ou autres, a été le plus difficile à réaliser, laborieux, plein d’obstacles.
Pourquoi ? Et la Belgique si proche a été tout aussi distante dans sa diversité maçonnique? Et la Suisse Lémanique ? Est-ce lié à la Francophonie, trop différente de l’espace culturel anglophone ? Sans en rien nier la valeur et l’ouverture franche de ce grand documentaire, est-ce aussi un apartheid induit par une autocensure involontaire ? Pour quand une suite à ce documentaire à vocation universaliste qui inclura aussi la Franc-maçonnerie libérale ? Et parti sur cette voie, car son temps est venu, la Franc-maçonnerie féminine ? De même, le paysage de la Terre Maçonnique sera on l’espère complétée à l’avenir avec la Russie et le Japon, les Philippines, le Singapour, l’Australie… Bien entendu, on ne peut pas tout faire en deux heures et avec le handicap des clivages actuels. Il n’y a pas besoin de consentir les différences mais il est raisonnable de les observer. Voici des sujets d'avenir, n'est-ce pas? Espérons, espérons… Et tiens, je me rends compte, au milieu du voyage, qu’on n’a pas passé grand temps à Londres même si c’est de là qu’on est parti…
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Pourtant, il ne faut pas être naïf, ce n’est pas par les images qu’on va changer l’avenir commun de la Franc-maçonnerie. Cette idée a été clairement exprimée pendant la discussion avec le public occasionnée par la projection de Terra Masonica :
«Après réflexion à avoir, dans le futur nous aurons certainement une convergence entre d'une part la Maçonnerie traditionnelle qui est dite orthodoxe ou "régulière", terme qui ne veut rien dire, et une Maçonnerie « humaniste ».
Pour la Maçonnerie orthodoxe il s'agit d'évoluer dans la question du genre et concernant les questions nouvelles qui se posent à l'humanité. D'autres aquariums, de Maçonnerie humaniste, qui se considèrent le centre de tous les aquariums continentaux, ont perdu le sens profond de la notion d'engagement, de parole donnée, de fondement même de la Maçonnerie. Une différence, fondamentale au niveau du grand public, qu'il faut clarifier, est la celle entre l'engagement pour les droit civiques et l'engagement politique. Or, [en maçonnerie] on ne fait pas de politique ni de religion. En tant que citoyens, nous sommes tous tenus à nous engager pour les droits civiques, dans la défense de notre citoyenneté… Il faut clarifier les définitions et mettre le curseur au bon endroit. Mais dans ces aquariums on a mis le curseur aux USA sur la finance requise, dans d’autres aquariums sur notre apport... à la nation dans ses frontières. En tout cas, impossible de Controller la dynamique interne de la FM dans son histoire. Personne n'est capable d'appuyer sur un bouton et donner une direction particulière Il y a une émergence, il n'y a pas de capitaine du paquebot… »
Enfin, trêve de commentaires. Dans les Vosges, loin des grandes villes, la Loge Jules Ferry, GODF (jadis Les Amis incorruptibles des Vosges) c’est ouvert aux réalisateurs, ornée de ses splendides vitraux.
Dès son début, la loge était dédiée à l’éducation, au progrès et au travail, en héritage de la maçonnerie du XIXe siècle qui militait pour la justice sociale. A présent, la crise économique ressentie dans les Vosges inquiète les franc-maçons. Les signes de problèmes politiques sont tout aussi inquiétants pour les maçons qui se sentent isolés... « Je veux préserver un héritage pour nos enfants…pour la planète aussi.
Nous laissons derrière nous trop de pollution, dit un des FF, « On voit que les Frères sortent dans le monde et apprennent par leur expérience du monde, l’écoute, par le contact de gens différents, du travail bien fait. Une vraie implication opérative. De plus, ce qu’on apprend en Loge est distribué à l’extérieur, car « le savoir est le vécu »
Ici on travaille beaucoup avec les jeunes. «... la société n’est pas égalitaire dans son fonctionnement, elle ne donne pas à tous les mêmes chances,. La franc-maçonnerie rectifie ce tir. Elle offre à des gens de cœur la chance d’entrer dans ces loges pour pouvoir s’y perfectionner …» on cultive ici les « valeurs de développement, altruisme et fraternité de la République Française laïque ».
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Le périple partie II
On peut comprendre la circonspection de la FM de l’Europe continentale en visitant l’Espagne. Au XXe siècle l’Europe fut ravagée par les dictatures fascistes. Le fascisme espagnol de Franco a été un des plus sanglants. Comme par exemple à Valencia, fief républicain. En Espagne il y a moins de 1500 franc-maçons. Même à ce jour, les graffitis sur la façade du petit temple de Valencia portent un message clair. Les portes du GLE à Madrid portent aussi les traces de l’anti maçonnerie.
Un sombre rappel pour ceux d’entre nous qui ont oublié que l’histoire change avec récurrence, l’incroyable arrive tôt ou tard. Chaque âge risque d’avoir son Moyen âge.
Moins nombreux, dans un environnement moins sûr, on sert les rangs. Au même étage on trouve la Loge Symbolique d’Espagne – mixte, à gauche et la Grande Loge d’Espagne à droite – réservée aux hommes. La LSE a été fondée au Mexique par des maçons réfugiés de la dictature de Franco. On sait que la FM mixte existe partout en Europe. La Grande Maitresse Nieves Bayo nous dit : « On a toujours occulté la répression subie par les franc-maçons. Noue étions 8000 en Espagne mais 80000 personnes ont été frappées par la répression antimaçonnique. Il est important de nous rappeler les morts pour la liberté et l’égalité des êtres humains. Les souvenirs des survivants et des familles s’enchainent…lourds, terribles. Tout ceci contre une maçonnerie profondément morale et humaniste.
Une visite à Salamanque, au grotesque musée de la « Maçonnerie » au QG de Franco, est édificatrice.
Des dizaines de milliers de fiches de suspects de maçonnerie sont gardées. La répression contre les maçons était tout d’abord physique. Ils étaient jugés par des tribunaux militaires, suivait souvent l’élimination physique ou des peines de 12 années en prison ou plus, selon le degré maçonnique.
L’obsession de Franco se voit dans le fantasmé « intérieur de temple» mis en scène à l’usage des services secrets.
Après le putsch armé de Franco c’est le premier bâtiment que les fascistes ont envahi, au lieu de la mairie ou le conseil municipal. A présent ce temple, en cours de restauration, est classifié comme héritage Européen. Le projet est de le transformer en musée de la FM et espace de rencontre des écoles de philosophie, de liberté et de tolérance.
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L’Ukraine, Odessa, nous offre occasion de rencontrer des FF d’une démocratie récente, à la liberté fragile, en pays ex-soviétique, en terre orthodoxe, à la croisée des civilisations. Ici il faut avoir courage pour être franc-maçon. Ces maçons prennent risque en se laissant filmer. L’adresse des loges est gardée secrète.
Les Frères d’Ukraine se sentent attachés à leur terre. Ils militent, ils sont conscients que leur rôle est d’aider leur pays et leur nation pour réussir. Il s’agit d’aider les jeunes qui cherchent à s’améliorer, être honnêtes vertueux faire le bien. Seuls les jeunes peuvent changer le pays.
Le but explicite de la FM d’Ukraine est de développer le processus démocratique, d’aider le retour à l’Europe. Ceci n’empêche les maçons de cultiver la méditation spirituelle, le « temple intérieur » et le travail sur soi.
Odessa, construite par des européens, par des maçons est une ville née «porto franco» ouverte au monde.
Mais l’Ukraine a connu le génocide stalinien.
On peut comprendre pourquoi on entend ici si souvent et passionnément le mot liberté, après tant de guerres et de terreurs, après un sommeil maçonnique de 80 ans.
Les FF ont bonne raison de comprendre pleinement le sens de la tolérance entre toutes religions et la fraternité entre les ethnies.
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« L’un des principaux problèmes d’aujourd’hui est l’ignorance » nous dit l’Assistant GM National. « C’est ce que nous combattons. Les gens doivent comprendre que la FM n’est pas une religion en conflit avec d’autres religions. Nos valeurs ne peuvent que servir. Étant musulman, monothéiste, ces valeurs renforcent ma foi.»
« L’arrivée de la maçonnerie en Afrique a été plus naturelle qu’ailleurs. » explique le Grand Maitre de la GLN du Mali. «Elle a été faite pour ce continent dans ses traditions.»
J’admire le beau cheval blanc qui gambade dans un jardin intérieur et je réfléchis au rapport de la FM au pouvoir et à la richesse.
« Je suis catholique de confession» dit un F:. « Ceci peut paraitre curieux dans un pays à majorité musulmane. Mais je travaille dans ma Loge comme les autres. »
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Les maçons sont fiers de réunir tous les enfants d’Abraham, toutes les croyances dans l’universalité. « Au commencement, Dieu… » Mais oui, la lutte entre ténèbres et lumière continue…
«Nous sommes sur une ile, au milieu d’un océan agité» nous dit un Passé Grand Maitre de la GLSI. «Il faut la protéger, sinon nous serions étrangers l’un à l’autre.»
Magnifiques images ! On peut toucher ici, des mains, le mur du temple de Salomon reconstruit par Hérode, lieu sacré si hautement symbolique pour tous maçons. Le modèle de ce temple deux fois détruit est repris par toute loge maçonnique. C’est aussi et surtout le temple intérieur, de l’effort vers la perfection, de devenir meilleur, de la vertu.
Impressionnante, la visite aux grottes de Sédécias, les carrières du Temple de Salomon. Quelle ambiance pour des tenues ! On dit que le Temple a surgi de ces profondeurs obscures.
La Grande Loge de l’État d’Israël, dont les quartiers sont à Tel-Aviv, est formé de 50 loges actives qui travaillent en 8 langues, sous le signe de la Croix, de l’Islam et de l’Étoile de David.
La Maçonnerie est ancienne au Moyen-Orient Depuis 1950, avec la montée des nationalismes les loges ont disparu d'Égypte, d’Irak, Iran et Syrie. En Israël, elles permettent la rencontre fraternelle d’hommes qui autrement se resteraient étrangers. Comme dit un frère, « la maçonnerie est la capacité de voir les choses en face. »
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A Calcutta on trouve le premier siège de la Grande Loge d’Angleterre, le début de la FM en Inde en 1728. Elle est venue itinérante avec les navires du commerce et les régiments coloniaux. Son rôle était caritatif, social, d’aide aux maçons expatriés et voyageurs qui parcourraient l’Empire.
La maçonnerie établie en Inde a évolué depuis. En 1843 une nouvelle loge fut fondée par quatre indiens dont un parsi Zoroastrien. Le Zoroastrisme de l’empire Perse, qui adore le feu, symbole de la lumière divine, est une des plus anciennes religions du monde. Il n’en reste que quelques milliers de Zoroastriens au monde mais la Franc-maçonnerie a trouvé place pour eux en son sein, en Inde. Les Parsi cultivent la pensée, la parole et les actes vertueux, c’est tout. Et la croyance en un dieu unique, bien entendu, rajoute-t-il. »
Je me rends compte en écoutant qu’il y a en Inde plein de polythéisme ancestral, beaucoup plus qu'un Grand Architecte, et que cela peut rendre difficile l’acceptation en Franc-maçonnerie.
Mais je me trompe. On apprend que les Hindous, longtemps interdits de loge, ont aussi voulu rejoindre la Franc-maçonnerie. A Calcutta, en 1872, un premier hindou fut initié. Depuis ils ont persévéré avec effort et sont devenus de plus en plus nombreux à rejoindre l’Ordre. En 1961 fut constituée la Grande Loge d’Inde. Ainsi, en Inde, on n’a pas un ou deux ou trois livres mais cinq livres sacrés sur l’autel sous l’équerre et le compas. En incluant la Bhagavad-Gîtâ, la Zend-Avesta, et le Granth Sahib des sikhs. « On n’impose pas une religion ou une pensée religieuse en particulier » précise un des Grands Officiers.
La structure de la maçonnerie est ample et compliquée, comme le pays, immense. Terra Masonica en visite de nombreux temples étonnants de variété et de beauté.
« Aujourd'hui la Grande Loge de l’Inde est parmi celles qui grandissent le plus vite au monde… Je pense que trente pour cent des habitants de l’Inde sont des gens cultivés… on peut devenir une des plus grandes loges du monde…»
Un saut au Nord vers la Punjab à Chandigarh, nous fait mieux comprendre le Sikhisme, enseignement spirituel et pragmatique, la plus jeune spiritualité religieuse du monde, datant du XVe siècle. On nous l’explique : « Quand le Sikhisme est né, la société était divisée en castes. Les hommes étaient considérés supérieurs aux femmes. L’homme dominait la femme. Face à cela nos gurus ont fait croire aux gens à l’égalité, au service de la communauté. » Il ne doit pas y avoir de castes. Vous devez être bon et devenir meilleur. .. »La maçonnerie et le sikhisme sont similaires, c’est ce qui attire les sikhs vers la FM. » On rajoute a ceci les défis de la lutte contre la pauvreté, objectif majeur de la maçonnerie, ici et ailleurs en Inde. La FM offre aux plus démunis des écoles, des crèches, de l’aide et des médicaments ou prothèses.
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L’Inde est en plein essor économique, social et démocratique. L’éducation fait émerger une importante classe moyenne, qui pose des questions. La Franc-maçonnerie y crée un élan universaliste. Ceci profitera bientôt aux jeunes et aux femmes.
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Visiter la Franc-maçonnerie des jeunes en Inde et aussi entendre les intéressantes discussions sur ce sujet des perspectives possibles d’une franc-maçonnerie des générations futures me semble riche en idées à retenir.
Parmi les facteurs de succès mentionnés - à investiguer et réfléchir posément, mutatis mutandis - on a cité tout d’abord la démocratie et l'émergence d'une classe moyenne, conditions de base.
Deuxièmement, que ce soit en Inde ou au Brésil, (en fait partout au monde) des populations sont en mouvement, il y a déracinés, expatriés, nouveaux intellectuels, les gens ont besoin d’accueil, d’accès et d’intégration dans une culture nouvelle pour eux. Ne pas être seul dans une ville étrangère. A notre époque de globalisation, Ils cherchent l’interface culturelle cosmopolite d'accueil, comme au début du XVIIIe siècle au temps des voyageurs marchands et militaires de la Franc-maçonnerie Anglaise. Cet esprit itinérant, de commerce, est un retour aux bases, une fonction à considérer… migrante (voir aussi la Maçonnerie d’ Irlande et Sud-Américaine.) Des jeunes entrent e maçonnerie parce que la FM st vécue comme un accueil, sinon ils partent.
Avec référence particulière à l'émergence de la FM « des informaticiens » en Inde, «…on apprend, on comprend en une semaine en loge autant qu’en 10 ans expatrié dans un pays. C'est le principe du rituel maçonnique (règles universelles d'une identité et de valeurs, un système stable, positif, comment se conduire, comment on réussit et comment on échoue, apprendre à se connaitre soi-même) Ce système est semblable à la société environnante et aide à la faire comprendre.»
Un nouvel élément significatif qui intervient dans la FM en Inde est le respect de la femme. « La construction d'une Maçonnerie inspirée d'Eastern Star, de certains rituels féminins, est spécifique, pas emprunté à la FM masculine ». Une structure régulière, reconnue égale et féminine, pour le futur, va permettre à toute une génération de jeunes filles trentenaires d'accéder à la Grande Loge Féminine d'Inde.
« ...la notion fraternité, de social networking, d'aide - ce sont des valeurs fondamentales qu'il faut mieux affirmer et préciser. La notion de foi en soi-même qui implique la foi en l'autre. On apprend avoir foi en soi-même. Bien sur le doute est porteur mais la Maçonnerie n'est pas un Agora philosophique, elle est une démarche initiatique et formative. »
Et la technologie peut-elle contribuer à de nouvelles formes de travail maçonnique ? Eastern Star utilisent le Skype, et l’envoi de vidéos aux maçons qui ne peuvent pas venir en loge pour raison d’âge de santé ou de voyage. A cela le contre-argument de bon sens est que la FM requiert du temps de qualité, le vécu, le jugement de soi par rencontre des autres. Il faut participer, observer mais aussi être l’acteur, ceci se fait en présence. Ce n’est pas un fast-food. Sinon, plutôt rester à la maison devant la télé. Pourtant, expérimenter peut être utile.
...
On a mentionné à la conférence de presse la création de LL dans des universités comme à l’Université Catholique de Louvain-la-Neuve la loge Athéna:
Il y a les jeunes qui voyagent, qui sont occupés. En Inde, idée intéressante, la séparation est faite entre initiation et vie maçonnique. La notion d'assiduité n'existe pas en Inde. On n’aurait pas pensé. Après l'initiation, si tout à coup vous avez des obligations, bébé, travail n'y a pas la pression culpabilisante qu'on compte vos absences avec reproche. Vous retrouvez un Frère après 10 ans comme si hier. Par contre, la loge téléphone, s'intéresse voir s’il y a besoin médical si tout va bien. Le dynamisme est incroyable comme il semble.
Ces jeunes partent partout dans le monde, heureux de voir et comparer avec la FM dans le monde. Ceci est une grosse piste... Pour ceci les Off:. de la L:. soit très expérimentés mais aussi distants. Dans la loge Indienne d’informaticiens visitée, ceux qui ont formé l’atelier s’attendent dans les 4-5 ans qu'on les laisse en paix, qu'ils s'en aillent et laissent la loge aux jeunes. Autrement, les jeunes qui restent en FM trois ans en moyenne, ne reviennent jamais. Pour les garder on leur donne la clé de la maison. » Étonnants récits !
En guise d’eau revoir le réalisateur conclut et on ne peut pas faire mieux que de le citer dire ne jamais avoir rencontré porte de bois dans son grand voyage d’Occident vers l’Orient.:
« Pour trois siècles la FM a évolué de manière inégale. Parfois ornement de la société, souvent persécutée. Elle s’est enrichie de toutes les cultures et traditions. Malgré les distances, les maçons partagent en même temps une vision commune et un attachement profond à leur terre, identité et nation. Les loges sont composées d’hommes qui par leur nature peuvent se tromper. Pourtant, la maçonnerie ne peut pas être une entreprise de mystification ou d’ésotérisme excessif. C’est un lieu égalitaire d’élévation…un microcosme de la société. Chaque loge représente l’Univers et chaque homme représente un Monde. Sa finalité ultime est de faire coexister et se rencontrer ces mondes. Grâce à son symbolisme particulier et universel, l’humanité s’y reflète. Le monde change pour le meilleur ou pour le pire. La franc-maçonnerie existera pour cette raison : elle est une alternative humaine ou le respect pour l’autre, du voyageur de toute vie sacrée, brille discrètement.»