De votre souvenir, qu’est-ce qui était critiqué ? Vous ? Vos amis ou proches ? Quelqu’un d’autre qui méritait bien une critique ? Votre travail ? Ce que vous avez dit ? fait ? écrit ? Une opinion ? Une proposition ? Une idée ? Un point de vue ? Un état de choses d’intérêt commun qui requérait un changement ?
Nos vécus, parfois pénibles et couteux, définissent ce que le mot critique veut dire pour nous.
J’ai vécu des critiques comme tout le monde, mais j'ai aussi eu la chance d’apprendre un art de critiquer et de faire usage des critiques dans mon travail de consultant et conseiller en matière de crises institutionnelles. Car donner conseil et intervenir, donner du « feedback » ou assister, évaluer ou être mentor, impliquent inévitablement la pratique de critiquer. Tout comme aider un ami ou votre enfant. Par expérience, je comprends la contribution vitale de la critique mais sa difficulté aussi.
Le sens commun préjuge sagement qu'il faut éviter de critiquer et de se faire critiquer. Mieux vaut ne pas voir du mal, ne pas entendre du mal, ne pas dire du mal... Comme les trois singes hindous. De plus, on ne sait pas comment s’y prendre ; le savoir-faire de la critique est rare et on n’apprend pas à l’école pourquoi, quand et comment critiquer.
Critiquer [ii] est tout d’abord un outil du mieux faire – pas pour faire du mal - tel que nos maillets et ciseaux. On œuvre pour ciseler la face encore brute. Le critiqueur qui sait ce qu’il fait, ne critique pas pour reprocher (inutilement) après coup, mais pour corriger, pour prévenir et surtout pour mieux faire par la suite. Ou alors, pour arrêter les pertes, protéger et éviter le pire qui s’annonce.
Le but d’une critique compétente est un progrès. Une critique complète, qui vaut la peine, est formative ; elle inclut sans les manquer, tant les points forts, pour les accroitre, que les points faibles, pour les corriger [i]. On peut même choisir d’encourager exclusivement ce qui réussit, en laissant oublier ce qui est faible.
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En bref, je vais décrire trois sortes de critique qu’on peut reconnaitre par leur but :
I - la Critique Amicale, au service du conseillé - elle protège et aide
II - la Critique Objective assure le résultat et la conformité – elle conclut en solution
III - la Critique Hostile cherche à rejeter empêcher, nuire et punir, elle finit avec vainqueurs contre perdants (ou tous perdants, souvent)
Il est bien de comprendre que, pour nous humains, critiquer et faire face à quelque critique – au quotidien ou dans les occasions spéciales – n’est pas une discipline académique ou scientifique, un traité de morale, ni une spécialité d’érudition biblique ou littéraire. C’est agir et s’émouvoir.
Critiquer c’est faire des choses avec des mots, avec des mimiques, gestes et souvent avec des faits. Même le silence ou l’absence, là où on est normalement présent, sont des moyens puissants de critique.
Ce n’est pas de la théorie mais de la pratique. De plus, critiquer et recevoir une critique sont des situations…critiques. Le stress n’y est jamais absent.
Alors, pourquoi prendre ce risque ?