Avec cet article, un vrai texte de philosophie maçonnique, nous commençons la série dédiée en mai et juin 2016 à nos choix de la spiritualité. Y a-t il vie spirituelle sans religion? L’humanisme laïque qui glorifie l’Homme, sa raison, et l’élévation vers la Divinité, si différents dans leurs certitudes, peuvent-ils se relier en harmonie dans leur recherche de vérité, de même que le carré mosaïque réunit le blanc et le noir ? Ou mieux ?
Ce fut-là mon trouble initial, lorsqu’une voix amie, un frère du Grand Orient de Suisse, m’invita à relier la Franc-Maçonnerie et la spiritualité humaniste et laïque, en sortant, si nécessaire, me dit-il, des chemins battus. Le contexte ? Une réflexion et des articles sur la spiritualité en F:.M:. et celui «d’un débat honnête» qui «réunit ce qui est épars», mutuellement respectueux d’au moins deux courants apparents parmi nous : la spiritualité « d’adhésion au divin » et la spiritualité laïque, (…) en rêvant de «ce débat comme partie d’une collection de textes de référence (…) qui offrirait au jeune maçon du G:. O:. S:. des repères éventuels »
Perplexité, car ce mot de spiritualité déclenche en moi un certain sentiment de défiance. Le thème rebondit, en effet, souvent, dans le travail en loges, comme un sujet-emplâtre que l’on choisit, faute de mieux.
Ensuite, comme un serpent de mer, l’idée émerge régulièrement qu’une conception ou une philosophie humaniste et laïque est nécessairement dépourvue de spiritualité. Une idée, une opinion qui fut, un temps long, dominante en Europe à l’époque où la religion monopolisait la vie spirituelle, soutenue, en cela, par le pouvoir civil. Une opinion qui prend aujourd’hui encore son envol, comme des bulles de savon, dans des pouvoirs et des croyances érigées en dogmes ou dans la lecture littérale des textes religieux sacrés. Des pouvoirs et des croyances qui souhaitent ainsi assurer l’exclusivité et la primauté de leurs valeurs morales.
Sentiment de défiance, enfin, né de la grande difficulté que nous éprouvons, aussi en franc-maçonnerie, à surmonter la bipolarité, le raisonnement manichéen, le blanc et le noir de notre pavé mosaïque. Sans se rendre compte que l’Homme est un Univers. Ce discours bipolaire, nos loges en sont, malheureusement, souvent imprégnées. Non seulement sur la spiritualité, confondant primat et primauté de l’esprit, confrontant spirituel à matérialiste ou athée, mais aussi sur l’équilibre et l’unité entre le chemin d’intériorité et l’action.