« Je n’ai pas d’argent et n’ai jamais appris d’autre métier que celui de la guerre ; maintenant que la paix est faite, je ne sers plus à rien et je vois bien qu’il me faut mourir de faim. »
« Ho-là ! Je sais bien, moi, ce qu’il te faut - dit l’étranger - c’est de l’argent. Tu en auras autant que tu le voudras et pourra en dépenser ; mais auparavant je dois m’assurer que tu n’as pas peur, car je ne donne rien aux poltrons. »
« Soldat et poltron sont deux mots qui ne vont pas ensemble. Tu peux me mettre à l’épreuve », dit le soldat en bondissant sur ses pieds.
« Eh bien alors, retourne-toi et regarde ».
« Ho ! Ho ! s’écria-t-il, je vais te chatouiller le museau et te faire passer l’envie de grogner. » Il le mit en joue, tira, et la bête tomba morte sur le coup.
« Je vois que tu ne manques pas de courage, dit l’étranger ; mais il faut encore que tu remplisses une autre condition. »
« Rien ne m’arrêtera, pourvu que mon salut éternel ne soit pas compromis », dit le soldat qui voyait bien à qui il avait à faire.
Le soldat songea à la grande misère dans laquelle il était réduit. Lui qui avait tant de fois affronté la mort, il pouvait bien se risquer cette fois encore… Il accepta. Le diable ôta son habit vert et le lui remis en disant :
« Tant que tu porteras cet habit, tu trouveras toujours de l’or dans la poche. »
Puis, après avoir dépouillé en un tournemain l’ours de sa peau, il ajouta :
« Ceci sera ton manteau et aussi ton grabat, car tu ne devras pas en avoir d’autre. Et à cause de cette pelisse, on t’appellera Peau d’ours. »
Là-dessus, le Diable disparut.