Ce qu'en pense ChatGPT en 2025
Bonne lecture avec un caveat. L'IA a encore une légère tendance à comprendre à l'envers, ici et là, comme on peut observer dans cette image illustrative Jour après jour, les Intelligences Artificielles de l'Internet, sont certaines de plus savoir, de tout savoir sur la Franc-maçonnerie et ses secrets. Au point ou des FF en peine de "lire et écrire" (pour ne pas parler des Profanes) s'informent sur ce sujet en tapant leurs questions dans Google. Pire, perspective effrayante, quelques Apprentis, Compagnons et même des Maîtres. prennent l'habitude de composer leurs Planches dans la lumière du Grand Frère Numérique.
En fait, cette énorme mémoire générative de paroles, mises en langue scientifiquement, de manière à satisfaire qui le veut et qui le clicque, se rappelle tous les mots des langues, toutes les phrases combinables des mots, tout ce qui a été publié sur tous les mots-clés. Ainsi, les lieux communs offerts en réponse de nos recherches ont l'air très bien et sont effectivement un excellent résumé de ce qui est dit dans le Monde.
Dans cette situation, il devient utile et même instructif de suivre attentivement ce qui se dit. Avec un petit pincement de sens critique, si on en a.
Nous avons choisi une notion essentielle pour tous les Maçons, le sacré et nous avons interrogé respectueusement ChatGPT pour voir ce qui se croit à ce sujet, et ce que l'Internet trouve de différent entre les maçonneries dites "régulières" et "libérales". Il apparaît qu'il y a plus de convergence qu'on ne croit.
Notions maçonniques du sacré : un aperçu
La franc-maçonnerie est souvent décrite comme « un système particulier de morale, voilé par des allégories et illustré par des symboles ». Cela signifie que la fraternité transmet des vérités éthiques et philosophiques à travers des objets symboliques et des rituels, plutôt que par un enseignement dogmatique. Par conséquent, ce qui est considéré comme sacré en franc-maçonnerie peut être à la fois spirituel (impliquant la foi et la révérence envers une puissance supérieure) et philosophique (impliquant la vénération des principes moraux et des idéaux).
Les francs-maçons ne prétendent pas pratiquer une religion ; en effet, un document maçonnique classique (les Constitutions d’Anderson de 1723) souligne que bien que les maçons ne doivent pas être des « athées stupides » ou des « libertins irréligieux », ils sont seulement tenus de suivre cette religion universelle sur laquelle tous les hommes s’accordent — être bons et sincères. Autrement dit, la franc-maçonnerie ancienne exigeait la croyance en Dieu et le respect d’une loi morale, tout en évitant les spécificités sectaires afin que des hommes de confessions différentes puissent s’unir en loge. Ce qui est sacré se centre donc sur la loi morale, la vérité, et les symboles et rituels qui transmettent ces valeurs.
En même temps, la tradition maçonnique crée une atmosphère sacrée en modélisant la loge comme un temple symbolique. La salle de loge est agencée pour représenter le Temple de Salomon, avec un autel central, les postes des officiers aux points cardinaux, et des cérémonies d’ouverture et de fermeture ritualisées. Dans ce cadre, certains objets, textes et actions sont traités avec la plus grande révérence. Au fil des siècles, différentes branches de la franc-maçonnerie ont mis l’accent sur des aspects sacrés différents. Ci-dessous, nous explorons comment la franc-maçonnerie régulière (ou « orthodoxe ») et la franc-maçonnerie libérale (ou « adogmatique ») définissent et traitent chacune le sacré, à travers des croyances spirituelles et des interprétations philosophiques.
Les symboles et objets jouent un rôle crucial dans ce que les francs-maçons considèrent comme sacré. En tête se trouvent les Trois Grandes Lumières de la Maçonnerie
: le Volume de la Loi Sacrée (VLS), l’Équerre et le Compas. Le VLS est le texte saint ou vénéré placé sur l’autel pendant les réunions de loge. Dans une loge traditionnelle (régulière), il s’agit généralement d’une écriture sainte — souvent la Bible, mais cela peut être le Coran, la Torah, les Védas ou toute autre écriture sacrée aux membres présents. Le VLS ouvert représente la vérité divine ou la « loi écrite » qui guide la conscience de chacun.
À côté du livre se trouvent l’Équerre et le Compas, les outils emblématiques de la maçonnerie. Ensemble, ils symbolisent la rectitude morale (l’Équerre rappelant aux maçons de conformer leurs actions à la vertu) et la maîtrise de soi spirituelle (le Compas leur rappelant de circonscrire leurs désirs). Même en dehors de tout contexte religieux, ces outils emblématiques sont traités comme des symboles sacrés des principes fondamentaux de l’Art. Comme l’explique une source maçonnique, le livre saint ouvert avec l’équerre et le compas incarne « le cadre spirituel et moral dans lequel nous œuvrons », servant de phare pour guider les maçons vers la vertu et l’unité.
La franc-maçonnerie régulière fait référence à la branche maçonnique représentée par la Grande Loge Unie d’Angleterre (GLUA) et ses alliées reconnues (y compris la plupart des Grandes Loges anglo-américaines et des corps annexes comme les rites écossais et de York). Les juridictions maçonniques régulières respectent un ensemble de « repères anciens » (Ancient Landmarks) ou principes de base qui définissent ce qui est sacré et inviolable dans la fraternité. Parmi ces repères figurent plusieurs exigences spirituelles : la croyance en un Être Suprême, la croyance en l’immortalité de l’âme, et la présence obligatoire d’un Volume de la Loi Sacrée sur l’autel de la loge.
En pratique, cela signifie qu’un candidat doit professer une croyance en Dieu ou en une puissance supérieure (quel que soit le nom donné à cette divinité dans sa religion), et que chaque loge régulière centre ses réunions autour d’un livre sacré ouvert. Comme le résume une source : « Une loge ne peut rêver d’être reconnue par la GLUA que si elle respecte ces repères » ; aucune loge ne peut donc être régulière si elle « fait abstraction de la notion d’Être Suprême » ou omet le livre sacré sur son autel.
Ces repères ont une autorité presque sacrosainte dans la maçonnerie régulière – ils sont considérés comme anciens et non modifiables.
Les francs-maçons réguliers considèrent donc le Grand Architecte de l’Univers (G.A.D.L.U.) – leur titre générique pour Dieu – comme un concept central du sacré. Le langage rituel et les prières dans les loges régulières invoquent le Grand Architecte lors de l’ouverture, des cérémonies de degrés, et à la clôture. Par exemple, une loge peut commencer par une prière sollicitant la bénédiction du Grand Architecte sur le travail, et se términer par une expression de gratitude. Bien que la fraternité n’impose aucune théologie spécifique (les maçons peuvent être chrétiens, juifs, musulmans, hindous, etc.), la reconnaissance d’une source divine de moralité et de vérité est essentielle.
Cela donne une coloration spirituelle à tout ce qui est considéré comme sacré dans la maçonnerie régulière : le VLS est vénéré non seulement comme un symbole, mais comme la parole de Dieu (quel que soit le texte utilisé), ou au moins comme un symbole de Vérité Divine ; les rituels sont souvent accompagnés de formules comme « au nom du Grand Architecte », conférant une bénédiction aux travaux. Même les vertus maçonniques (Amour Fraternel, Secours, Vérité) sont vues comme des reflets de vertus divines.
Les serments maçonniques comme engagements sacrés
Un autre élément sacré important est le serment maçonnique. Lorsqu’un initié jure fidélité aux secrets et principes de la loge, il le fait sur le Volume de la Loi Sacrée et en présence de Dieu comme témoin. Cela rend le serment spirituellement contraignant. Il est courant d’entendre les maçons réguliers parler du serment comme d’un lien sacré les unissant à tous les maçons et à leur propre conscience devant Dieu.
L’importance de cela se manifeste dans le soin apporté à la cérémonie : le candidat s’agenouille à l’autel, sur lequel repose le livre sacré ouvert, surmonté de l’équerre et du compas, et il répète un vœu solennel. Des commentateurs maçonniques soulignent que l’autel – avec ces objets sacrés – « nous rappelle que les principes que nous chérissons reflètent l’ordre divin de l’univers ». Autrement dit, l’autel de la loge est symboliquement le point de contact entre le maçon et le divin.
Les gestes physiques, comme s’agenouiller ou embrasser le VLS après le serment, renforcent l’idée que cet acte relève en fait d’un culte non confessionnel (culte de la Vérité et de la Vertu sous le regard de Dieu).
Les hauts degrés et les règles comme sacralisations supplémentaires
Le caractère sacré dans la franc-maçonnerie régulière se retrouve aussi dans ses rites et degrés supérieurs. Par exemple, dans le Rite de York, le degré culminant de l’Arche Royale révèle le Nom perdu de Dieu – un moment traité avec une révérence profonde. Le Rite Écossais Ancien et Accepté est également riche en symbolisme mystique, avec des degrés faisant référence à des scènes bibliques, des philosophies mystiques, et des mystères sacrés de diverses cultures. Dans le 32e degré, les maçons prêtent serment sous la devise Deus Meumque Jus (Dieu et mon Droit), renforçant l’idée que les symboles maçonniques mènent à la vérité divine.
Enfin, certains principes sont également considérés comme sacrés dans le sens d’inviolables. Les « repères anciens » eux-mêmes sont parfois décrits avec un langage quasi-religieux. Par exemple, un ancien Grand Maître de l’Iowa déclara en 1878 que le Grand Orient de France, en supprimant l’exigence de croyance en Dieu, avait renié « l’autorité suprême de Dieu sur les hommes et les maçons » et ne méritait donc aucune reconnaissance.
Franc-maçonnerie libérale : interprétations philosophiques du sacré
Contrairement à l’approche orthodoxe, la franc-maçonnerie libérale (également appelée continentale, adogmatique ou moderne) adopte une vision plus humaniste et philosophique de ce qui est sacré. Les obédiences maçonniques libérales comprennent des organisations telles que le Grand Orient de France (GODF), Le Droit Humain (l’Ordre Maçonnique Mixte International), le Grand Orient de Belgique, etc. Ces obédiences sont nées de changements historiques à la fin du XIXe siècle, qui ont volontairement assoupli ou supprimé les exigences spirituelles de la maçonnerie régulière.
Le moment décisif fut en 1877, lorsque le GODF vota la suppression de son article constitutionnel affirmant « l’existence de Dieu et l’immortalité de l’âme » comme principes de la franc-maçonnerie. À sa place, il adopta de nouveaux principes déclarant que la franc-maçonnerie « n’est pas une religion et n’a donc ni doctrine ni dogme à affirmer », proclamant plutôt qu’elle est « une institution essentiellement philanthropique, philosophique et progressive », orientée vers la vérité, la moralité et la justice, avec « la liberté absolue de conscience » comme principe fondamental.
Ce changement marqua une profonde rupture philosophique : le sacré n’était plus défini en termes théologiques, mais selon des valeurs humanistes et la liberté de pensée.
Dès lors, la maçonnerie libérale (menée par les loges françaises) embrassa l’humanisme des Lumières comme guide. Le Grand Orient adopta explicitement la devise de la République française — « Liberté, Égalité, Fraternité » — comme sienne. L’être humain, la conscience individuelle et le progrès social devinrent centraux. Pour les maçons libéraux, quelque chose est sacré non parce qu’un dieu l’a décrété, mais parce que c’est fondamental à la dignité humaine ou au progrès moral.
Par exemple, la liberté de conscience – le droit de chaque individu à ses propres croyances – est considérée comme inviolable (presque sacrée) dans les obédiences libérales. Elles accueillent croyants et athées, affirmant qu’en loge « la liberté de conscience est absolue, et les athées sont acceptés ». Ce principe est souvent formulé comme la laïcité : une stricte neutralité à l’égard de la religion.
Autel laïque et symboles républicains
Concrètement, une loge libérale ne commence pas ses réunions par une prière et ne demande pas aux candidats de professer une foi en un Être Suprême. Au lieu d’une Bible ou d’un Coran, de nombreuses loges libérales placent sur l’autel la Constitution maçonnique ou la Déclaration des droits de l’homme comme Volume symbolique de la Loi Sacrée. (Dans la maçonnerie continentale, une constitution ou un code civil peut symboliser la « loi » directrice, reflétant la conviction que la raison et les droits universels sont les fondements de la vérité, plutôt que la révélation divine.)
Certaines loges laissent l’autel vide ou permettent à chaque initié de choisir un texte ou un symbole qui a du sens pour lui — par exemple, un livre de philosophie, un livre vierge représentant le livre de la nature, ou rien du tout. Le serment est alors prêté « sur l’honneur » ou sur ce que l’initié tient pour sacré personnellement, sans nécessairement invoquer Dieu. Cette approche fait de la conscience individuelle l’arbitre sacré de l’engagement.
Image p.5 : Un buste en bronze de Marianne (personnification de la République française), orné de symboles maçonniques. Les loges libérales françaises exposent souvent Marianne et le drapeau tricolore, sacralisant les idéaux républicains – liberté, égalité, fraternité.
Symboles, mythes et rituels réinterprétés
La franc-maçonnerie libérale conserve les symboles, mythes et rituels maçonniques, mais les interprète d’une manière plus allégorique ou philosophique séculière. Par exemple, les maçons libéraux peuvent encore parler du « Grand Architecte de l’Univers » dans certains rituels, mais laissent à chacun le soin de l’interpréter : cela peut être compris théistement, panthéistement ou purement symboliquement comme le principe d’ordre de l’univers ou l’idéal de perfection.
Beaucoup de loges libérales ont en fait supprimé toute référence explicite au Grand Architecte après 1877, mais certaines (comme Le Droit Humain ou la Grande Loge de France) peuvent conserver le terme dans leurs rituels comme concept symbolique. L’essentiel est qu’aucune définition particulière ne soit imposée.
De même, la légende de la construction du Temple de Salomon, au cœur du rituel maçonnique, est encore jouée, mais la maçonnerie libérale en souligne la leçon morale et sociétale plutôt que l’histoire sacrée littérale. Le temple devient un symbole du temple de l’Humanité ou de la société idéale bâtie sur les vertus.
Le « Mot Perdu » que les maçons recherchent peut être compris non comme le nom littéral de Dieu (comme dans l’Arche Royale traditionnelle), mais comme une métaphore de la vérité ou de l’illumination recherchée par l’humanité.
Comparaison du sacré entre la franc-maçonnerie régulière et libéral
Les deux branches de la franc-maçonnerie partagent un héritage de symboles et d’enseignements moraux, mais leur compréhension de ce qui est « sacré » diffère dans ses fondements et son expression :
Croyance en un Être Suprême
C’est le clivage le plus clair. En franc-maçonnerie régulière, la croyance en Dieu (quelle qu’en soit la conception) est obligatoire et fondamentale, souvent qualifiée de repère ancien immuable. La présence de Dieu (Grand Architecte) fonde le caractère sacré des obligations et rituels.
En revanche, la franc-maçonnerie libérale défend la liberté absolue de conscience, autorisant explicitement les athées et agnostiques à rejoindre la loge. Les loges libérales ont supprimé les références à Dieu dans leurs constitutions et rituels à partir de la fin du XIXe siècle, estimant que toute exigence religieuse est étrangère à la maçonnerie.
Pour les maçons réguliers, la loge est sacrée parce que la présence invisible du Grand Architecte bénit leurs travaux. Pour les maçons libéraux, la loge est sacrée parce qu’elle reflète les idéaux universels de l’humanité — l’« être intérieur » de la conscience et de la raison, plutôt qu’une divinité externe.
Volume de la Loi Sacrée (VLS)
La maçonnerie régulière exige qu’un texte sacré soit ouvert sur l’autel à tout moment. Dans de nombreuses juridictions, il s’agit par défaut de la Bible (en Angleterre ou aux États-Unis), ou bien de plusieurs livres si les membres ont des croyances différentes (Bible, Coran, Gita, etc.). Ce livre est traité avec une grande révérence – les maçons le saluent pendant les rituels et ne le profanent jamais.
En maçonnerie libérale, cette exigence a été abandonnée. Certaines loges libérales placent un livre symbolique sur l’autel – Constitution, pages blanches, livre de lois – au lieu d’une écriture sacrée. Beaucoup d’obédiences libérales affirment explicitement qu’aucun VLS n’est requis sur l’autel. Cela signifie qu’aucun dogme religieux ne régit la loge – la loi humaine ou le livre de la nature peuvent symboliser la vérité.
Les maçons réguliers peuvent voir dans l’absence d’un livre sacré une perte d’ancrage spirituel. Les maçons libéraux y voient une affirmation de neutralité et de libre pensée.
Rituel et invocation
Les loges régulières ouvrent et ferment les travaux par la prière, et invoquent des bénédictions « au nom du Grand Architecte de l’Univers ». Les loges libérales, après 1877, ont cessé toute prière obligatoire ou invocation divine. Elles peuvent commencer par une réflexion silencieuse ou une exhortation philosophique. Par exemple, au lieu de prier, le Vénérable Maître d’une loge libérale pourrait rappeler les devoirs envers l’humanité ou lire un poème humaniste.
Le ton solennel est présent dans les deux cas, mais l’un fait appel à Dieu pour sanctifier la réunion, tandis que l’autre invoque la fraternité universelle ou la conscience morale des membres. Chacune définit le sacré différemment : pour les réguliers, le sacré est garanti par le regard de Dieu ; pour les libéraux, il naît de l’engagement collectif et de la profondeur des idéaux eux-mêmes.
Principes moraux et repères
La maçonnerie régulière protège certains principes traditionnels (exclusion des femmes, interdiction des débats politiques ou religieux en loge, reconnaissance limitée aux loges respectant les repères) comme des règles quasiment sacrées.
La maçonnerie libérale a modifié ou rejeté nombre de ces traditions.
Par exemple, l’exclusion des femmes est un repère ancien pour les réguliers (« un maçon doit être un homme, libre et de bonne réputation »), tandis que des obédiences libérales comme Le Droit Humain ont institué la mixité, et que le GODF admet aujourd’hui des femmes dans certaines loges.
Les maçons réguliers voient dans l’interdiction des discussions politiques un moyen de préserver l’harmonie sacrée de la loge, comme un sanctuaire neutre.
Les maçons libéraux, au contraire, considèrent l’engagement dans les causes sociales comme un accomplissement du devoir maçonnique – pratiquement une obligation sacrée de « bâtir le temple de l’humanité » dans le monde réel.
Cela signifie que les obédiences libérales publient régulièrement des prises de position sur les droits humains, la laïcité ou la paix (le GODF s’est historiquement engagé sur l’éducation, le mariage pour tous, etc.). Pour les maçons réguliers, cela viole la tranquillité sacrée de la maçonnerie ; pour les maçons libéraux, cela honore ses principes sacrés de justice et d’égalité.
Compréhension du « sacré »
La franc-maçonnerie régulière utilise généralement le mot sacré dans un sens spirituel ou religieux — par exemple, la Loi Sacrée, la Loge Sacrée, la géométrie sacrée (considérée comme investie d’une signification cosmique ou divine).
La franc-maçonnerie libérale, bien que moins encline à employer explicitement le terme (car il sonne religieux), considère néanmoins certaines choses comme profondément inviolables. On pourrait dire que la maçonnerie libérale sacralise la Raison, la Science et le Progrès Humain.
En effet, la résolution du GODF de 1877 affirme que la maçonnerie a pour objet « l’étude de la morale universelle, des sciences et des arts, et la pratique de la bienfaisance ». L’accent mis sur la science et la raison traduit un changement fondamental : la connaissance issue de l’enquête rationnelle est considérée comme ayant une valeur suprême (presque sacrée au sens philosophique), par opposition à la connaissance révélée. Symboliquement, cela se reflète dans la manière dont les loges libérales valorisent les figures des Lumières — il n’est pas rare d’y voir des portraits de philosophes ou de scientifiques, là où une loge régulière pourrait exposer des figures bibliques ou des saints patrons.
En somme, la maçonnerie libérale considère parfois les Lumières elles-mêmes comme la « tradition sacrée » qu’elle perpétue.
Une convergence dans la diversité
Malgré ces différences, il est important de noter que les maçons réguliers et libéraux révèrent tous deux les mêmes vertus fondamentales : vérité, morale, fraternité, charité, amélioration de soi. Ce qui diverge, c’est l’origine de cette sacralité. Un maçon régulier pourrait dire que la Vérité est sacrée parce qu’elle est un attribut de Dieu, tandis qu’un maçon libéral dirait qu’elle l’est parce qu’elle fonde la compréhension et l’éthique humaines.
Le maçon régulier voit la loge comme un espace sacré sous la paternité divine ; le maçon libéral comme un espace sacré célébrant la fraternité humaine.
Conclusion
Le concept de sacré en franc-maçonnerie est riche et multiple. Pour la franc-maçonnerie régulière, il s’enracine dans le spirituel : Dieu, l’Écriture, l’âme immortelle, la loi morale intemporelle — le tout incarné par des objets comme le Volume de la Loi Sacrée et la solennité des rituels.
Pour la franc-maçonnerie libérale, le sacré est transposé dans la philosophie : l’inviolabilité de la conscience, l’élévation de l’humanité, les symboles de liberté et d’égalité — visibles dans une approche ouverte des symboles et dans la révérence portée aux droits humains et à la raison.
Et pourtant, les deux traditions partagent le langage sacré du symbolisme. Un maçon régulier et un maçon libéral peuvent se tenir devant le symbole du soleil levant à l’Est et tous deux y voir quelque chose de sacré — l’un y verra la gloire divine, l’autre la lumière de la raison — mais tous deux s 'inclineront devant la Lumière. En ce sens, la franc-maçonnerie, dans son ensemble, transforme des objets ordinaires (livres, outils, mots, rituels) en porteurs de signification. C’est cet acte d’investir du sens et de la révérence — qu’elle soit d’origine spirituelle ou philosophique — qui rend ces choses sacrées pour les francs-maçons.
Textes et doctrines clés cités
Au fil de l’histoire maçonnique, les documents et constitutions ont reflété ces divergences sur la notion de sacré :
Les Constitutions d’Anderson (1723) – Établissent l’exigence de croyance en Dieu et interdisent les « athées stupides », tout en promouvant une morale universelle au-delà des sectes. Ce texte est un fondement de l’orientation spirituelle de la maçonnerie régulière.
Les repères anciens (Mackey, etc.) – Codifient les principes inviolables : Dieu, l’âme, le VLS, l’exclusion des femmes, etc., que les loges régulières traitent comme des règles sacrées.
Révision constitutionnelle du GODF en 1877 – Supprime la référence à Dieu et à l’immortalité, déclare la maçonnerie non dogmatique, et y ajoute la liberté de conscience et la solidarité humaine comme principes. Ce texte est le socle de la philosophie libérale.
Discours et actes des loges régulières dès 1878 – Condamnations de la nouvelle orientation du GODF, comme celle de la Grande Loge de l’Iowa qui accuse le GODF d’être en « antagonisme avec les traditions, pratiques et sentiments de tous les vrais maçons » et de nier « l’autorité de Dieu sur les hommes et les maçons
».
Textes philosophiques maçonniques – Morals and Dogma d’Albert Pike (1871), texte régulier, empreint de mysticisme symbolique et de syncrétisme religieux. Du côté libéral, les écrits de Léonce Fabre d’Olivet ou les articles de la revue Humanisme développent une interprétation humaniste et laïque, bien que moins connue internationalement.
Déclarations modernes des Grandes Loges – Aujourd’hui, la GLUA déclare par exemple : « La franc-maçonnerie n’est pas une religion, mais elle exige la croyance en un Être Suprême ». De leur côté, le GODF et Le Droit Humain publient des principes affirmant « la liberté absolue de conscience » et l’adhésion aux valeurs humanistes. Ce sont là, en somme, les doctrines de chaque courant sur la sacralité.

















































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